Traque [PV Louve]

Pour une fois, discuter tranquillement ne lui semblait pas trop complexe, et ne lui filait pas de migraine impossible à supporter. Il fallait aussi signaler que le sujet n'était pas spécialement intellectuel : leur vécu n'était pas spécialement passionnant, ni émaillé de démonstrations mathématiques de douze pages. Oui, elle avait posé pied ici avec un naufrage, elle venait de l'extérieur et d'une famille de la haute société. Certes, il était pur Lycan, son père avait été tué par les sangsues, et il n'avait mordu personne. Rien de complexe, nul besoin de réfléchir, elle comprenait parfaitement la situation sans se fouler les neurones. Comme quoi Lugh pouvait être calme, parfois…
Mais il ne le resta pas assez longtemps.
Le regard tout sucre, tout miel de cette abrutie de vendeuse de brioches ramena malheureusement ce sombre imbécile à sa place habituelle, celle de l'horrible dragueur pour lequel sauter sur ce qui portait un utérus frôlait la pathologie. Wolfy souffla fortement pour signifier son agacement, ce qui ne changea rien. Il fallait croire que le lycanthrope avait un mode "on" et un mode "off", et qu'on venait de le rallumer… En effet, elle n'avait pas remarqué ses vaines tentatives pour la rendre jalouse, aveugle comme à son habitude aux syndromes de la séduction sauf quand ils venaient d'autres filles. Que voulez-vous, elle ne les comprenait pas mais analysait plutôt bien leurs comportements, ce qui, soit dit en passant, lui donnait la nausée : ces espèces de cruches maquillées, habillées comme des poupées de porcelaine, qui ne pensaient qu'à avoir un bon mari et à vivre en paix… Bah ! Où était le goût de l'aventure, du suicide permanent, la montée d'adrénaline quand on frôlait la mort, quand on était une telle créature ? Elles devaient s'ennuyer à en mourir, pensait-elle, engoncée dans leurs tenues moulantes et leurs coiffures complexes. Quand à les voir ivres mortes à la taverne, un soir d'hiver, blotties au coin du feu avec un pichet d'alcool fort… Cela ne risquait jamais d'arriver. Oui, elles rataient une vie palpitante faite de lèvres fendues et de batailles d'ailes de poulet, debout sur une table ! Toutefois, elles avaient ce que la jeune fille à moitié sauvage ne risquait pas de trouver : la paix, le calme, et quelqu'un qui veille sur elle.

Bref, revenons maintenant à notre mini-pousse rousse à la crinière hirsute et passablement trempée. Elle venait de voir sa petite main pâle de se faire attraper sans ménagements par une grande paluche au sang chaud, ce qui l'agaça. Pour la seconde fois, il lui tenait le poignet, et l'impression d'avoir une menotte chauffée à blanc sur l'avant-bras était plutôt désagréable, aussi remua-t-elle le membre en question pour se débarrasser de la poigne d'acier de Lugh. C'était sans compter le regard enjôleur qu'il lui lança et qu'il glissa ensuite vers l'imbécile à la poitrine de vache à lait, qui acheva de la scotcher sur place. Mais à quoi jouait-il maintenant ?

- Brenda, mon chou, tu ne vois pas que ma fiancée voudrait un petit pain au chocolat, une brioche, et un verre de ta délicieuse citronnade ?

Que… Quoi ?! Sa fiancée ? Il ne tenait pas à la vie ? Prise totalement au dépourvu, Louve cessa son agitation fébrile pour lancer au Lycan un regard parfaitement stupide, empli d'un mélange de stupéfaction et d'incompréhension la plus totale. Mais elle en avait un, de fiancé, et il ne se transformait pas en prédateur de la taille d'un poney pour un oui ou pour un non ! Cependant, cette situation était plus problématique encore que prévu : elle oscillait entre castrer Lugh une bonne fois pour toute puis réfuter son annonce et confirmer ses dires afin de voir la poupée blonde et rose se décomposer sous ses yeux. Quel dilemme ! Les deux avaient des qualités, l'un son statut d'homme et l'autre son sang humain ; et les deux avaient des défauts, ce qui pour le mâle se résumait avec son caractère, et pour la nunuche avec sa faiblesse d'esprit. Que faire ?
Rien.
Le long silence perplexe que laissa planer Wolfy avait plusieurs interprétations, et Blondie venait d'en choisir une. Profitant du désarroi de la minuscule furie, elle lança un regard de veau larmoyant au lycanthrope, ses lèvres pleines et peintes tremblant sous la violence de sa tristesse face à la trahison. Ses beaux yeux s'emplirent de larmes, factices ou non –mademoiselle du Mont ne le savait guère-, et elle sembla vaciller sous le choc, le tout devant les yeux d'une jeune aristocrate retournée à l'état sauvage qui n'en avait visiblement rien à faire. La badauds commencèrent à se rassembler, cherchant l'ignoble qui rendait si triste cette chère imbécile.

- Tu… Tu es fiancé… ? Depuis quand… ?

La magnifique démonstration de pathos de Brenda n'émut pas Louve, qui sortit de sa torpeur pour lancer un regard dégoûté aux deux protagonistes du drame qui se nouait. Que faisait-elle ici ? Entre l'autre neuneu qui pleurait comme un crocodile pour une plaisanterie, et l'autre suicidaire qui cherchait à tout prix les crosses, elle avait l'impression que son crâne recommençait à surchauffer. Elle ne voulait qu'une brioche, une petite brioche de rien du tout, et il lui fallait endurer ça pour y arriver…

- Ouais, chuis fiancée ! Et tu croyais quoi ? Qu'il resterait pour toujours dans le souvenir de ta poitrine surdimensionnée, qu'il n'irait pas voir ailleurs ? T'as d'l'espoir, chérie… Nan, mais franchement, tu l'as cru quand il t'a susurré qu'il t'aimerait toute sa vie, qu'il reviendrait t'épouser et que vous aurez une jolie maison au toit de chaume et une bande de marmots braillards ? J'crois même pas qu'il soit capable de penser au-delà de son propre nez, mince !

Cette tirade, bien que cruelle, était un reflet parfait des doutes qui habitaient Louve sur le moment. Elle était vraiment curieuse de savoir si la poupée Barbie avait crû aux beaux mensonges du loup d'anthracite, si elle s'était noyée dans ses yeux couleur saphir en pensant sérieusement qu'il l'épouserait. Oui, elle venait de briser ses rêves, comme l'air désespéré de la vendeuse lui suggérait, mais elle ne comprenait pas que l'on puisse croire à des promesses venant d'un inconnu. Ses paroles claquèrent en l'air comme une pluie d'éclairs, assénées lourdement d'une voix rauque et métallique. Qu'elle se réveille, qu'elle cesse ses âneries, qu'elle ne la regarde plus comme un monstre. C'était Lugh, qu'il fallait blâmer ! Mais l'autre ne voulait visiblement pas la croire. Quoi, elle était une horrible menteuse qui voulait s'approprier le séduisant jeune homme, maintenant ?
De plus, elle n'avait pas menti en disant qu'elle avait un promis. Et elle ne comptait pas laisser le Lycan dans son triomphe à cause d'une phrase un peu floue. Sans se dégager de son emprise, elle se redressa sur la pointe des pieds avant d'attraper une touffe de sa chevelure couleur de nuit et de tirer dessus pour qu'il penche sa tête vers elle. Pour quelqu'un d'extérieur, ce pouvait tout à fait être pris pour une forme d'amour quelque peu sadique… Mais pour la demoiselle à la chevelure de feu, ce n'était qu'un moyen de préserver un temps soit peu sa crédibilité.

- J'vais te faire manger tes tripes, loup ! Comment oses-tu me faire passer pour ta promise ? J'ai un véritable fiancé, figure-toi, et j'suis pas sûre qu'il apprécie la blague, quand bien même il ne serait pas ici ! Et en plus du fiancé, j'connais au moins une autre personne qui ne sera jamais d'accord avec cette stupide boutade ! Suis-je compréhensible ?

Elle raffermit sa prise sur les cheveux de Lugh durant quelques secondes, puis relâcha la mèche ténébreuse et retomba sur ses pattes, échevelée comme un animal sauvage enragé. Le peuple commençait à se désintéresser du triangle amoureux, et se retirait à ses occupations pour laisser le petit serpent roux, le loup gris et le navet rose en larmes seuls, histoire de régler leurs soucis.

- Ho, cesse de pleurer ! T'es adulte, oui ou non ?

Aucun tact, Louve…

~~

Z'ont intérêt à être bonnes, les brioches, avec tout ce qu'il faut faire pour les manger X3
*console la pauvre Brenda*

Invité

Louve resta une bonne minute en total bug informatique, les yeux et la bouche ouverts, et un air de pure perplexité scotché sur le visage – bon, il n’imaginait pas la réaction pour une demande en mariage ; de toute façon, le temps qu’elle se remette, Brenda parlait déjà, ses gros yeux de poissons larmoyants se levant gentiment sur lui et sa figure angélique affichant un masque éploré. Sa petite bouche en fleur tremblotant fébrilement, et ses jolies mains lachèrent le chausson aux pommes qu’elle tenait ; elle dit quelque chose de presque inaudible qu’il n’écouta pas, trop préoccupé par l’angle parfait de vision qu’il avait quand elle se voutait, bouleversée, et faisait de son tablier un ornement inutile et une barrière évanescente quant au massage intensif de poitrine.

Puis, la petite Humaine-future-lycanne, chérie de son cœur, se mit à beugler sur la boulangère bien en chair d’un air torve et d’une voix rauque, les poings serrés de rage et les yeux foudroyants – et, si elle ne l’avait pas refroidie de ses révélations, il l’aurait violée sur l’étale à brioches.

- Ouais, chuis fiancée ! Et tu croyais quoi ? Qu'il resterait pour toujours dans le souvenir de ta poitrine surdimensionnée, qu'il n'irait pas voir ailleurs ? T'as d'l'espoir, chérie… Nan, mais franchement, tu l'as cru quand il t'a susurré qu'il t'aimerait toute sa vie, qu'il reviendrait t'épouser et que vous aurez une jolie maison au toit de chaume et une bande de marmots braillards ? J'crois même pas qu'il soit capable de penser au-delà de son propre nez, mince !

…

Il ne releva ni les insultes, ni les sarcasmes de la jeune fille ; son esprit s’était fixé au premier cri, à l’annonce hurlante de ses fiancailles, et avec qui ? Il savait qu’elle n’aurait jamais menti pour justifier un futur mariage avec lui-même, ce qui voulait dire qu’elle était engagée ailleurs ; il resta bouche bée à son tour, sa main serrant toujours celle de Louve sans s’en apercevoir, et il serra soudain les dents, formant dans le creux de ses joues l’angle dur de sa mâchoire ; qui ? Un humain d’ici ? Un loup, un vampire ? Lequel lui avait piqué le gros lot avant qu’il n’ai le temps de jouer son chiffre de loterie ? Il allait le buter proprement et simplement, avec crocs, griffes et tout le tralala, quitte à engendrer la décapitation et autres mutilations salissantes. Il tourna son regard vers Louve et la foudroya d’une œillade mauvaise qu’elle sembla occulter pour lui attraper les cheveux violemment.

Ah ; après les doux atouts basés plus bas dans son anatomie, les cheveux étaient son point le plus faible ; l’adorable petit chou avait un cuir chevelu fort sensible et étouffa un cri de douleur et de surprise lorsqu’elle chopa entre ses doigts griffus une touffe de tignasse noire, et tira dessus comme sur un pompon dans un manège ; il se baissa immédiatement en suivant le mouvement, de peur de souffrir un peu trop, et ferma les yeux pour entendre son murmure nerveux et agacé qu’il finit par savourer – Benh quoi ?! C’était pas souvent qu’il pouvait espérer une telle proximité ! La, le souffle joueur de Louve du Mont caressait sa peau et ses doigts labouraient son crâne, ce qui, finalement, était presque érotique.

- J'vais te faire manger tes tripes, loup ! Comment oses-tu me faire passer pour ta promise ? J'ai un véritable fiancé, figure-toi, et j'suis pas sûre qu'il apprécie la blague, quand bien même il ne serait pas ici ! Et en plus du fiancé, j'connais au moins une autre personne qui ne sera jamais d'accord avec cette stupide boutade ! Suis-je compréhensible ?

Bien, le connard véloce et sa bague n’étaient pas sur l’ile ; alors elle pouvait bien chialer et prier pour le revoir, son idiot du village, elle ne se marierait jamais, JAMAIS, JAMAIS avec lui. Il n’allait pas par un pur hasard échouer sur l’ile joyeusement, pour les beaux yeux de mademoiselle ; il poussa un soupir de soulagement et ouvrit les yeux pour regarder le visage proche de la jeune fille ; son regard glissa sur la rondeur de sa pommette et sur les linéaments harmonieux de sa figure triangulaire ; puis, sa deuxième phrase claqua dans son crâne et il retint son souffle.

Si elle n’avait pas voulu parler d’Elle, il y pensa néanmoins, et si tel était son sous-entendu, il passa très bien ; l’image de Leah s’imposa à l’esprit de Lugh, image féroce au regard torve et aux bras violemment croisés. Il récapitula chacune des fautes qu’il avait faites ou envisager dans cette matinée, et sut que, sitôt qu’il aurait quitté Louve, la chef de la meute lui tomberait dessus aussi lourdement qu’un ours assoiffé de sang ; la furieuse louve blanche trancherait et assénerait sa sentence de sa voix froide, son regard fixe plein de mépris, érigerait des interdictions, et il n’aurait plus qu’à l’envoyer se faire voir pour revoir la rouquine hystérique ; il sut, sut, ce qu’elle dirait, ce qu’elle limiterait. Il sut qu’elle ne lui pardonnerait pas, sa bataille avec une humaine, ses flirts avec cette faiblarde blanchâtre et plate, sa mutation en plein village et l’attaque animale sur la Chétive, qu’elle lirait dans ses pensées ses désirs de transformations lycanthropes ; il déglutit, et, reprenant contenance, refoulant la pâleur qui lui avait monté aux joues, il souffla d’une voix légèrement rauque, et tentatrice :

- Donne-moi l’identité de ton promis, et je le pourfendrais, beauté. Toi et moi, on aura assez de gosses pour repeupler Cave Cadas et construire un yacht taille XXL, mon cœur. Tu la veux, cette brioche, ou tu m’embrasses ?

Elle le relâchait alors qu’il terminait sa tirade, et il regarda la boulangère en larmes tandis qu’elle se faisait invectivé par la planche à pain albinos ; il la regarda toute entière, les pupilles glissant du haut de son crâne échevelé à sa nuque déjà observée, à la courbe enchanteresse et subtile de son dos et de son ventre, et ses jambes fuselées ; ses cheveux gouttaient encore sur le sol, il releva les yeux vers Brenda, lui sourit et dit d’une voix douce en attendant les répliques de Louve :

- Allons, Brenda, nous deux, ca ne pouvais pas marcher. Je n’ai pas un sous, ton père ne m’aurait pas accepté. Mais ne t’inquiète, je te garderais toujours dans mes fantas… cœur.

- Mais on peut tout simplement nous enfuir tous les deux sans l’accord de mon père ! geignit soudain Bren-bren, démontrant par la même occasion qu’elle savait s’exprimer avec plus de quelques hoquets et autres sons monosyllabiques.

Lugh leva les yeux au ciel, et tendit deux ou trois pièces normalement destinées à l’achat des divines cigarettes ; qu’est-ce qu’il ne ferait pas pour la bestiole mammairement indéfinie…

- Enfuir… Ou, Brenda ? Ce n'est pas comme si nous pouvions partir. Files-moi cette brioche. Ma Louve chérie a faim. N’est-ce pas, ma douce ?

Battant des cils comme une midinette, il tapota l’abdomen plat de la « chérie », et, le regard paternel, susurra comme un coup de grâce, parce qu’il s’éclatait un max :

- C’ est qu’elle mange pour deux, hein !

~~

J'avoue, j'avoue. J'attends que Louve tue Lugh.
Heureusement que tu la consoles, cette pauv' Brenda, parce que j'aime bien la torturer aussi T-T
*Lui tapotes la tête et envisage sérieusement de lui faire une fiche présa tellement je l'aime xD*

Jamais Wolfy n'avait pensé que l'allusion au défunt Swordman effraierait tant le lycanthrope, mais elle ne rata pas la pâleur qui monta à ses joues, ni son regard effrayé, ni même l'aller-retour de sa pomme d'Adam lorsqu'il déglutit péniblement. Forcément, se retrouver menacé de poursuites par un fantôme très largement vindicatif, ça ne laissait personne de marbre. La rouquine ricana intérieurement, sans rien laisser paraitre, puis cessa ses âneries après quelques secondes d'agitation de méninges. A tout bien y réfléchir, peut être qu'il n'avait même pas songé à l'épéiste, et qu'il pensait que sa menace concernait quelqu'un d'autre… Mais oui, comment pouvait-il même connaitre Sword ? Imbécile, idiot, il lui avait fait une fausse joie ! Pour la peine, elle racla encore plus ses ongles sur l'épiderme de son crâne, prenant un plaisir sadique à le voir si mal en point. C'était noté : lorsqu'elle voudrait se venger de lui, elle frapperait dans ses Valseuses ou lui tirerait les cheveux, à défaut de pouvoir faire les deux choses à la fois… Elle était bien trop petite pour lui labourer le cuir chevelu tout en mettant des coups de genoux, ou alors elle devrait se jucher sur un banc, une rambarde, une chaise ou un quelconque promontoire pour arriver à ses fins.
Hormones à la manque, qui n'avaient pas accepté de lui donner une dizaine de centimètres supplémentaires ! Louve relâcha les cheveux de Lugh, ignorant son commentaire stupide sur une portée de marmots braillards, et grommela pour la forme sur son père avant d'incendier Brenda. Laquelle se remit immédiatement à lancer des regards de chien battu au loup d'anthracite, comme s'il pouvait la sauver des griffes du petit marcassin poil-de-carotte. Comme si quiconque pouvait l'empêcher de faire ce qu'elle voulait ! Contrairement à Blondie, elle était libre comme l'air, et avait tendance à défier les autorités et les règles établies. Pauvre vendeuse de brioches… Le regard haineux de la furie se teinta de pitié, mais l'autre ne la vit pas, trop occupée à essayer de retenir l'amour volage du coureur de jupons.
Aurait-elle été ainsi si elle était restée chez elle ? Si le bateau n'avait pas coulé, se serait-elle engoncée dans des tenues sensées mettre en valeur ses arguments inexistants ? Aurait-elle essayé d'apitoyer son fiancé s'il l'avait trompée ?
N'aurait-elle jamais rencontré Lugh ?
Claque sur son front et feulement de rage qui répondit à la question stupide de l'imbécile aux cheveux d'ébène. Il recommençait ses tours de magie débiles afin de lui embrouiller le cerveau, ou alors c'était la faute de la petite voix qui lui murmurait des inepties à l'oreille, mais une seule chose était sûre : dans son état normal, l'aînée des filles du Mont n'aurait jamais pensé à un quelconque garçon, sauf si ce dernier était un punching-ball convenable. Il fallait le brûler une bonne fois pour toutes… Sans y faire attention, elle tendit la main vers Bren-bren afin de recevoir sa brioche. Vu le mal qu'elle avait eu à l'avoir, cette brioche, elle avait intérêt à avoir bon goût ! Le précieux sésame, enfin, tomba dans sa main, lâché par une jolie blonde au bord de la crise d'apoplexie qui voyait, en plus, l'amour de sa vie la lâcher pour une planche à pain élevée chez les barbares. Un véritable camouflet… Visiblement concentrée sur quelque chose de lointain, la délicate boule de nerf croqua dans la brioche.
Doux, sucré, fondant… Une multitude d'adjectif parvinrent à son cerveau subjugué devant un tel goût. Pour celle qui ne mangeait que de la viande séchée depuis quelques semaines, la sucrerie était une variation agréable dans un quotidien salé et utilitaire. Ses grands yeux mornes prirent les accents de la joie alors qu'elle mordait à pleines dents dans la viennoiserie, ravie de l'aubaine. C'était sacrément bon et, malgré tout les griefs qu'elle avait envers Blondie, elle ne pouvait que reconnaitre son talent pour la cuisine. A quelques mesures d'extases, elle lui demandait sa main et partait avec la blonde aux formes alléchantes pour des nuits de noces peuplées de brioches et de pains aux raisins.

Ca ferait enrager un certain lycanthrope, en plus : il n'y avait que des avantages à son union avec la fille du boulanger. Allez, Brendie, épouse Louve et soit heureuse avec elle…

- C’ est qu’elle mange pour deux, hein !

Wolfy ne se rendit compte que quelques secondes plus tard de la boutade, lorsqu'une main calleuse se mit à lui tapoter le ventre, lequel était désormais agréablement plein de viennoiserie au goût sublime. Mais c'était qu'il venait de briser son rêve de romance avec la faiseuse de sublimes brioches –et non la sublime faiseuse de brioches-, cet imbécile ! Et pour quoi ? Une boutade stupide, et un coup sur l'estomac ? Vengeance ! Partant au quart de tour et oubliant totalement qu'elle venait de faire croire à Brenda, bénie soient ses pâtisseries, qu'elle était fiancée, mademoiselle l'aristocrate bondit sur l'étal d'un mouvement vif et gracieux. Juchée ainsi sur la planche tenue par des tréteaux, les pieds sagement ancrés entre le tas de pains au raisin et les croissants, elle toisa Lugh de haut. Littéralement. La brioche à moitié mangée avait trouvé le chemin de sa main… Puisque les quelques miettes qui trainaient au coin de sa bouche n'altérant pas son air de profond mépris, elle ne s'en soucia pas et continua de lancer un regard furieux sur le lycanthrope.

- Je mange pour deux ? Moi ? Mais t'es parfaitement débile, ma parole ! J'vais te les faire ravaler, tes âneries !

Du grondement suave, sa voix était subtilement passée au rugissement sauvage, au cri de rage à peine contenu… Et le tout en une minuscule boutade, qui d'ailleurs n'était pas là pour faire joli. Décidée à laver l'affront, une fois de plus, elle se jeta sur le Lycan, sautant du haut de son piédestal improvisé comme un chat bondirait sur une souris. Une grosse souris très agaçante, et un peu stupide sur les bords.
Ses doigts fins rencontrèrent ce qu'elle pensa être une épaule, et Louve s'agrippa de toutes ses forces à ce bout de muscle, crochetant ses jambes autour de la proie, visant de l'autre main la bouche de l'impudent. Elle allait l'étouffer avec un bout de brioche, tout compte fait, ce qui serait sans doute une solution bien plus brève et simple que de l'immoler par le feu en dansant quelques pas joyeux. Ce n'était sans doute pas cette attaque qui allait le déstabiliser, elle le savait fort bien, mais elle espérait au moins l'agacer, sinon le mettre dans un état nerveux proche du sien. En clair ? Déplorable. L'assaut ne l'empêchait d'ailleurs pas de beugler des imprécations et des menaces au Don Juan local, farandole d'insultes englobant aussi la pauvre Bren-bren et les tréteaux de son étalage.

Au fait, que devenait Brendie ? Elle observait l'escarmouche d'un air horrifié, les mains devant la bouche, les yeux écarquillés, comme si elle n'avait jamais vu deux pochtrons se mettre amoureusement sur le pif. Ou peut-être comprenait-elle enfin que les deux imbéciles n'étaient pas vraiment fiancés.
Ou peut-être qu'elle était juste stupide et qu'elle ne comprenait rien.

- Et je refuse d'avoir une bande de marmots braillards, encore moins si t'es le père !

La jeune du Mont venait de se souvenir qu'il l'avait taquinée à propos d'une portée d'horribles mômes, et se rattrapait maintenant, comme elle le pouvait. Dans un coin de sa tête, Lupin, Bestiole, Taré, Loup et Sauvage passèrent, bande de nabots échevelés, roux avec des mèches noires, des épées en bois dans les mains, puis allèrent se perdre dans une zone inutilisée de son cerveau.

~~
Naaah, le tuer serait trop doux. J'envisage de le livrer à Josh', ce serait tellement plus drôle XP
En gros, c'est l'amour vache entre toi et cette malheureuse Brenda ? Pauvre faible créature ;_;
Je prie pour qu'elle trouve un mari convenable *présente des mâles à Bren-bren*

[Navrée, sujet clos. Plus d'information par MP si besoin est.]

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